Par une pratique de l’art essentiellement portée par la peinture, mon travail récent aborde les questions de la trace, de la mémoire et de la fatalité. Via des références urbaines et industrielles, mes œuvres reprennent le faciès architectural des différents bâtiments désaffectés, usines et structures bétonnées de Montréal. Ceux-ci demeurent l’expression de toutes ces grandes villes qui, suite au vécu d’une grande effervescence économique, voient leur hardiesse décliner. J’introduis dans mon travail cette idée par la couleur rompue, par la touche aride, raturée et expressive de ma peinture, où maints déchets, circulaires, journaux et éléments typographiques peuvent servir de particules de collages pouvant densifier ma surface de travail et ainsi, perturber la réception des différents signifiants. Si la plupart des œuvres excluent toute figuration humaine, ces immenses bâtiments demeurent le témoignage d’un vécu ouvrier dans la pérennité de l’histoire, de ses différentes luttes de classe et de hiérarchies sociales.

Cette essence humaine, poussée dans un combat permanent pour son salut, m’a toujours fasciné et m’a amené tout récemment à me questionner sur des notions plus vastes relatives au pouvoir. En résonnance à Foucault (Surveiller et punir, 1975) sur les nombreuses procédures mises en place au fil du temps afin d’asservir les individus et les rendrent malléables, je désire dans mon travail actuel ne laisser aucune ambiguïté quant aux différents acteurs des enjeux d’aujourd’hui. Entre autres, par la dénonciation d’un dictat érigé par l’État et le Corporatisme, et de notre adhésion consensuelle à cette posture. J’aborde les rouages et la mécanique des relations intrinsèques entre le dominant et le dominé qui conditionnent différentes facettes de nos vies au niveau politique, économique, religieux et familial. Pour cela, j’imprègne ma pratique artistique d’une forte sensibilité politique qui peut se manifester de différentes façons. D’abord, par un travail pictural qui emprunte à l’iconographie libertaire et au ton pamphlétaire. Ensuite, par l’appropriation des médias de masse, tel le journal et ce, dans un désir de subvertissement propre au culture jamming, afin de replacer les enjeux humains au coeur du sujet.